LES RITES DE LA FETE DU TÊT (nouvel an lunaire vietnamien)

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Cette fête, une des plus ancrée dans les traditions et les esprits, est célébrée avec beaucoup de ferveur en CHINE et au VIETNAM. Bien que ce jour ne soit pas une fête religieuse, au vietnam, plusieurs divinités sont célébrées lors du nouvel an lunaire (1er jour du 1er mois lunaire), le « Têt Nguyên Dan ». Ce jour là, tout est décoré de rouge, couleur du bonheur en orient (même actuellement, il est fréquent de voir des mariées vêtues de rouge). Il est le premier des retrouvailles des membres de toute une famille : les défunts pourront ainsi retrouver les vivants et partager trois jours durant, les festivités. Les croyances disent que durant le 1er jour lunaire, les portes séparant le monde des morts et celui des vivants s’entrouvrent pour que les retrouvailles puissent être effectives. Mais les esprits de nos chers défunts sont toujours accompagnés par une cohorte de diables et démons. Voilà pourquoi les gens font beaucoup de bruit avec des tambours, des gongs et des cymbales et brûlent de longues bandes de pétards qui effraient les êtres malfaisants pour les chasser et les renvoyer dans leurs enfers.

Plusieurs autels seront dressés :

1) Autel du Bouddha :

Il est d’usage d’effectuer 9 prosternations (lay) avec 3 baguettes d’encens. A noter, lorsqu’on allume des baguettes d’encens, il faut, pour éteindre la flamme, agiter les baguettes et non les souffler comme une bougie, car l’offrande serait souillée par ce souffle qui est considéré comme impur. Cet autel est toujours placé en hauteur.

offrandes :

-          3 tasses de thé secdes chrysanthèmes jaunes (à défaut  de fleurs de prunier « bông mai » jaunes) ou des azalées rouges
-          2 bougies rouges (pour diffuser la lumière permettant de guider les esprits vers le monde des vivants)
-          de l’encens (offrande de pureté olfactive pour les cieux)
-          7 fruits répartis en 2 assiettes (assiette 1 : composée de 5 fruits en respect de la règle des 5 éléments (ngu hanh) mangoustan, figue, noix de coco, papaye, mangue (le nom de ces 5 fruits prononcés dans cet ordre forme un jeu de mots : prier pour demander d’avoir suffisamment de tout pour dépenser. Ceci est un vœu d’abondance et de prospérité) / assiette 2 : clémentines (symbole de bonheur, de fécondité et d’abondance) et une demie pastèque bien rouge (couleur du bonheur qui signifie ici l’abondance et la fortune)
-          assiette de sucreries (nougat de cacahuètes, de sésame, de sésame noir, courge et papaye confite, graines de lotus, bonbons divers…)

2) Autel de la déesse Quan-Am (déesse de la miséricorde, protectrice des enfants) :

9 prosternations avec 3 baguettes d’encens. Autel similaire à celui du Bouddha.

offrandes :

-          3 tasses de thé sec
-          des chrysanthèmes jaunes ou des azalées rouges
-          2 bougies rouges
-          de l’encens
-          5 fruits répartis en 2 assiettes
-          assiette de sucreries

3) Autel de Quan-cong (général chinois canonisé et représentant le dieu de la guerre et la droiture. Les vietnamiens donnent la même représentation de l’empereur Trang-Hung-Dao, créateur des arts martiaux vietnamiens : barbu, en tunique verte, tenant une hallebarde) :

4 prosternations avec 3 baguettes d’encens. L’autel placé en hauteur, mais moins haut que celui du Bouddha et de la déesse Quan-Am.

offrandes :

-          3 tasses de thé sec
-          des chrysanthèmes jaunes ou des azalées rouges
-          2 bougies rouges
-          de l’encens
-          un poulet bouilli entier
-          déposer une hallebarde et une épée

4) Autel aux divinités célestes :

4 ou 9 prosternations avec 3 baguettes d’encens. Cet autel est généralement posé devant les maisons à environ 1 mètre de hauteur.

offrandes :

-          3 tasses de thé sec
-          des chrysanthèmes jaunes ou des azalées rouges
-          2 bougies rouges
-          de l’encens
-          5 fruits répartis en 2 assiettes
-          assiette de sucreries

5) Autel du génie de la terre (Ong Dia):

avec 3 baguettes d’encens, mais pas de prosternations. Cet autel est toujours posé à même le sol, dans un coin de la maison.

offrandes :

-          3 tasses de thé sec
-          des chrysanthèmes jaunes ou des azalées rouges
-          2 bougies rouges
-          de l’encens
-          5 fruits répartis en 2 assiettes
-          assiette de sucreries

6) Autel des ancêtres :

4 prosternations avec 3 baguettes d’encens (NB : 3 prosternations pour les vivants). Cet autel est posé en hauteur, néanmoins plus bas que celui du Bouddha et de la déesse Quan-Am.

offrandes :

-          3 tasses de thé sec
-          des chrysanthèmes jaunes ou des azalées rouges
-          2 bougies rouges
-          de l’encens
-          5 fruits répartis en 2 assiettes
-          assiette de sucreries

Chacun est libre de se recueillir devant l’autel ou les autels de son choix, suivant ses convictions ou son ressenti. Mais il est de bon ton de présenter les respects à ses aïeux.

A l’occasion de cette fête, les gens s’échangent des cadeaux mais surtout, les enfants présentent leurs vœux de bonne année (les trois bonheurs : santé, abondance et sagesse) à leurs aînés dans une attitude respectueuse, les bras croisés (lam « Ha ») et affichent leurs bonnes résolutions pour l’année à venir. Leurs aînés leurs offrent alors des étrennes dans une petite enveloppe rouge (bao lixi). D’une manière générale, les aînés offrent à leurs cadets la même chose, même si ceux-ci sont adultes. L’argent - billets ou pièces - contenu dans ces enveloppes est toujours neuf et brillant pour les pièces. Souvent les gens le gardent précieusement dans leur portefeuille pour attirer la bonne fortune durant toute l’année.

Plus particulièrement, dans les écoles d’arts martiaux traditionnels, les élèves effectuent devant leur maître une démonstration des techniques étudiées durant leurs précédentes années d’apprentissage pour lui rendre hommage et parfois le maître effectue lui-même une démonstration de son savoir.

C’est à cette occasion que les élèves des différentes écoles d’arts martiaux s’affronteront dans « le concours de licornes (lân) », animal sauvage mythique à tête de lion cornu et corps de serpent. Manipulé par deux étudiants, l’animal devra décrocher une enveloppe rouge (bao lixi) remplie d’argent attachée à une salade (symbole d’abondance dans un pays essentiellement rural) sur la devanture de chaque maison, commerce ou école. La licorne rendra la salade à l’occupant ou au propriétaire des lieux, accompagnée de quelques piécettes. La notion de mérite est très importante, car plus la difficulté est grande, plus l’enveloppe sera garnie. Mais lors du concours annuel, les licornes devront se mesurer dans une sorte de parcours du combattant dont la dernière épreuve est l’ascension d’un mat au sommet duquel se trouve le prix - un lingot d’or - qui permettra à l’école de subvenir à ses besoins durant toute l’année à venir.  La licorne de l’école lauréate de ce concours pourra porter la fameuse et convoitée barbe blanche. Lorsque deux licornes se croisent, celle qui ne porte pas la barbe blanche doit lui céder le passage. Enfin, dans un village ou une province une seule licorne a le droit de porter ladite barbe, faute de quoi les élèves s’affrontaient à coup de pied et de poing sous l’œil de leurs maîtres respectifs.

Le fête se terminera très tard autour d’un repas traditionnel constitué de soupe de riz aux abats (chao lông), gâteau de riz gluant (cylindrique au sud et portant le nom de banh têt, carré au nord et portant le nom de banh chung) des navets salés (cu cai) et porc au caramel (thit khô) accompagné de germes de soja fermenté (da), sans oublier les nombreuses douceurs : graines de pastèques colorées de rouge, graines de lotus glacées, nougats au sésame, courges,  oranges confites, kakis séchés, soupe sucrée (chè)… Chaque convive prendra des nouvelles de tous les siens et souvent les anciens racontent aux enfants, des légendes, des histoires du temps passé et de revenants.

Concernant les traditionnels gâteaux de riz, les femmes du foyer en auront préparé un certain nombre permettant à la famille de se nourrir sans travailler. En effet, il est très mal vu d’avoir une activité durant ces trois jours consacrés aux loisirs et à la famille. Le ménage aura été fait en grand durant les jours précédant le nouvel an pour accueillir le riz qui ne supporte ni la saleté ni la poussière (légende vietnamienne). Si c’était le cas, le labeur sans la fortune s’abattra sur la maisonnée.